Michael Saylor
CEO Microstrategy, Hope, Saylor Academy
Robert Breedlove
Créateur et animateur du podcast « What is Money »
Lien vers l’épisode original, en anglais
Transcription du fichier audio : Stephen Chow @chowcollection
Traduction : Jacques-Edouard @Jacques_BTC
Robert Breedlove: Hey tout le monde ! Bienvenue dans cet espace Twitter dédié à la sortie du livre de la série Saylor. C’est en fait le premier espace Twitter que j’organise, alors merci de vous joindre à nous. Et voici notre estimé invité, M. Michael Saylor, qui vient de nous rejoindre.
Michael Saylor: Hey merci de me recevoir, Robert.
Robert Breedlove : Merci de te joindre à nous, Michael. Et donc, comme beaucoup d’entre vous le savent peut-être, Saylor et moi avons enregistré une longue série ensemble – 17 épisodes au total – qui était la série inaugurale de mon émission : The What is Money Show. On a commencé à la diffuser fin 2020 à la fois sur YouTube et sur le flux du podcast. Je pense que le contenu total représente environ 25 heures pour les 17 épisodes. Plus récemment, on a publié un livre, qui est essentiellement une transcription de notre conversation avec quelques points de résumé à la fin de chaque chapitre.
Aujourd’hui, nous allons passer en revue les points clés de cette conversation et du livre qui est maintenant disponible sur Amazon. Pour commencer, je voudrais dire que les réactions à cette série ont été très nombreuses ! Il y a une semaine, je me promenais dans mon quartier de Nashville, dans le Tennessee, et un sexagénaire qui était en train de tondre sa pelouse a arrêté la tondeuse et a traversé la rue en courant vers moi pour se présenter et me remercier abondamment pour cette série en particulier. Ça a été un peu étrange de voir à quel point la portée de cette série a été grande, étant donné que ma question initiale à Michael était simplement « Qu’est-ce que l’argent ? Prenons le temps d’en parler un moment et voyons où cela nous mène ? Et donc, à titre personnel, j’étais très heureux de voir que les gens ont trouvé cette chose précieuse, et puis la portée et la longévité de la série ont été assez impressionnantes. Michael, est-ce que tu aurais des réactions ou des commentaires particuliers à partager ici suite à cette conversation ?
Michael Saylor: Oui, c’est ce que je pensais : Je n’avais jamais vraiment réfléchi à ce qu’est l’argent jusqu’à ce que tu me le demandes. Et puis on s’est assis pour ce podcast – je pensais que ça durerait quelques heures – et ça nous a amené à 18 heures ou quelque chose comme ça ! Et puis en fait ça nous a pris 25 heures. Et tout ce qu’on a fait au cours de ces sessions était en grande partie basé sur un plan que j’ai rapidement déroulé au cours de la première heure : J’avais juste créé un aperçu d’un tas de choses que je voulais couvrir, et puis le reste est venu spontanément.
C’est intéressant ce qui sort spontanément, et quand j’ai regardé la transcription de ce livre que vous avez préparé – il fait 400 pages – j’ai pensé, ça fait beaucoup de mots ! Beaucoup de mots, pour un sujet fascinant, cependant : Qu’est-ce que l’argent ? La plus haute forme d’énergie que les humains peuvent canaliser. L’argent c’est de l’énergie. Un système monétaire est un système énergétique. Et dès que vous commencez à penser la monnaie comme système énergétique – si vous êtes ingénieur – ce qui vous vient ensuite à l’esprit est ce sont ces pensées sur tous les autres systèmes énergétiques : les systèmes énergétiques hydrauliques, l’eau, l’électricité, les systèmes énergétiques thermodynamiques, les systèmes énergétiques mécaniques et ainsi de suite, et il y a tant de leçons à tirer de tous ces autres systèmes énergétiques.
En partant simplement du constat que l’argent est de l’énergie et qu’un système monétaire est un système de transfert d’énergie pour déplacer de l’énergie dans le temps et dans l’espace et/ou pour faire vibrer de l’énergie sur une fréquence donnée, ou pour programmer de l’énergie, rediriger de l’énergie – une fois que vous avez saisi cette idée, vous pensez aux systèmes de poulies. Et un système de poulies permet à une personne de transporter un poids 10 fois supérieur à celui qu’elle pourrait soulever sans ce système de poulies. Donc : avantage mécanique, poulie et levier. Et quelles sont les techniques pour rediriger l’énergie ? Je vais tirer vers le bas, mais je veux que le vecteur d’énergie s’éloigne de moi – comment faire ? C’est un sujet que les ingénieurs traitent en permanence : les ingénieurs en mécanique, les ingénieurs en génie civils, les ingénieurs nucléaires, les ingénieurs aéronautiques, les ingénieurs océaniques – ils sont toujours confrontés à l’énergie et aux matériaux. Ils l’étudient avec beaucoup de discipline, et il y a de bonnes réponses et il y a de mauvaises réponses !
Les mathématiques sont importantes, il y a les lois de la physique et on ne peut pas tricher. Il y a toujours les lois de la thermodynamique : l’énergie ne peut être ni créée ni détruite – on ne peut que la transformer, transformer sa nature. La règle numéro un de la thermodynamique est : on ne peut pas tricher ! Tu ne peux pas tricher, tout simplement! Les ingénieurs le savent et conçoivent tous leurs systèmes dans le respect de cette règle. Il n’y a pas de raccourcis. Il n’y a pas de repas gratuit, comme le disait Heinlein dans ses livres. Et chaque ingénieur aéronautique le sait : si tu veux que l’avion aille plus loin, tu vas devoir renoncer à une certaine charge utile ou changer de matériau. Et si tu veux qu’il aille plus vite, tu vas devoir renoncer à un certain degré de sécurité pour aller plus vite.
Les ingénieurs vivent donc dans ce monde – mais pas les économistes – et l’argent est traditionnellement le domaine des économistes, du moins dans notre monde moderne. Les économistes et les politiciens. Nous avons des avocats chargés de la masse monétaire ! Les économistes, les avocats, les politiciens sont considérés comme qualifiés pour gérer le système bancaire, le système monétaire et la masse monétaire. Mais si tu acceptais l’idée que l’argent est de l’énergie, et qu’un système monétaire est un réseau énergétique, alors tu penserais que je devrais mettre un ingénieur en charge de tout ça ! Et avec Bitcoin c’est la première fois que quelqu’un a compris comment concevoir un système monétaire. Et Satoshi est un ingénieur, un ingénieur aux multiples facettes qui avait une bonne connaissance non seulement de l’économie et de la politique, mais aussi du génie mécanique, du génie électrique, de l’informatique, des systèmes cybernétiques, des servomécanismes, de la stabilité et de la rétroaction. Et la stabilité de premier ordre est quelque chose que tu dois absolument comprendre si tu es un ingénieur aéronautique ! Lorsque tu conçois un avion, s’il est stable, cela signifie que si l’avion s’incline de 10 degrés sur la gauche, la portance de l’aile s’accumule pour ramener l’avion au centre. Et s’il est stable, il aura tendance à voler droit et à l’endroit. S’il est instable, lorsqu’il s’incline de 10 degrés vers la gauche, il aura tendance à s’incliner de 20 degrés de plus vers la gauche, puis il se retournera et entrera dans une spirale de la mort pour s’écraser au sol et tu mourras. Le manque de stabilité signifie donc généralement que l’avion se crashe et brûle. Et dans le domaine de l’ingénierie océanique, lorsque tu construis un navire, tu recherches la stabilité, de sorte que lorsque le navire penche de 10 degrés sur un côté, il tend à vouloir revenir à la stabilité. Vers un point neutre, flottant et stable. Et s’il le fait, il ne chavirera pas. Mais s’il est instable – si le centre de gravité est trop haut ou le centre de masse trop haut dans le navire – tu t’inclines de 20 degrés vers la gauche ou quelque chose comme ça : tu obtiens un roulis et l’engin se renverse.
Donc, ne pas concevoir des systèmes intrinsèquement stables est une condamnation à mort dans le monde de l’ingénierie. Mais dans le monde monétaire, ne pas assurer la stabilité est un inconvénient politique et tu te contentes de botter en touche et de laisser la personne suivante s’en occuper. En fin de compte, le résultat est l’effondrement du système monétaire, mais si cela prend 10, 20 ou 30 ans, tu n’es pas là et tu peux simplement rejeter la faute sur autre chose. Et donc je pense que cette question a eu un grand impact sur moi – comme tu peux le constater. Et le résultat, ce sont ces 25 heures de contenu et ces 400 pages! Et la dernière fois que j’ai vérifié sur YouTube, il semble que 250 000 personnes l’aient visionné, ce qui est assez surprenant.
Robert Breedlove [12:23] : Oui, c’était assez formidable. Et je trouve ça intéressant qu’une question finalement assez simple sur quelque chose qu’on utilise tous et à laquelle on pense tous les jours t’amène directement à des considérations des plus primordiales – on parle de temps, d’espace et d’énergie, de systèmes de rétroaction, etc. Et j’ai vraiment apprécié la formulation: tu parlais de Bitcoin qui nous faisait passer d’une monnaie gérée par des politiciens à un système monétaire conçu techniquement de manière appropriée. Et je pense que le thème central de la série Saylor – s’il y en a un – c’est le suivant : comment les êtres humains canalisent l’énergie à travers l’espace et le temps pour atteindre leurs objectifs. Et tu as fait un super boulot en commençant par le commencement – je ne sais pas si c’est possible d’aborder le sujet en se basant sur des principes encore plus fondamentaux – tu démarres à l’âge de pierre en développant essentiellement ta thèse jusqu’à l’ère numérique. Et sur la façon dont les humains ont canalisé l’énergie au cours de l’histoire, tu t’es d’abord concentré sur trois technologies : le feu comme technologie énergétique, les missiles et l’hydraulique comme moyen de canaliser l’énergie gravitationnelle. Est-ce que tu peux nous donner un petit aperçu de l’importance du feu, des missiles et de l’hydraulique ?
Michael Saylor [13:49] : Lorsque j’ai commencé à penser l’argent comme système énergétique et à l’argent comme forme d’énergie sociopolitique et économique, ça m’a conduit à me poser la question suivante : » Quels étaient les systèmes énergétiques formateurs de la race humaine à l’ère paléolithique ? Je suis donc remonté 100 000 ans en arrière et je me suis demandé ce qui avait élevé l’humanité. Et ce n’est pas si difficile !
1) Le feu – nous avons Prométhée dans notre mythologie, et tout l’intérêt du feu c’est d’exploiter et de canaliser l’énergie chimique. Convertir une bûche en chaleur ou en lumière c’est une bonne chose, cuire de la nourriture – ou pré-digérer de la nourriture – en utilisant une bûche en bois c’est aussi une bonne chose. Je me suis concentré sur cet aspect parce qu’il est étroitement lié à notre biologie évolutive et que de nombreuses personnes soutiennent la thèse selon laquelle l’humanité n’aurait jamais vu le jour si nous n’avions pas maîtrisé le feu, parce que on ne pouvait pas digérer suffisamment de nourriture et le faire assez rapidement pour détourner l’énergie vers notre cerveau. Et donc, si tu n’as pas de feu – tu es un cheval ou une vache et tu manges toute la journée – tu ne deviendras jamais aussi intelligent, car une grande partie de ton énergie est détournée vers ton tube digestif ! Il n’est donc pas nécessaire de réfléchir longtemps pour se rendre compte que le feu est un moyen de protection et un moyen de ne pas mourir de froid, un moyen de digestion, un moyen de signalisation, un moyen de collecte et de maintien de l’information – sans parler du fait que tu ne fais pas que cuire des aliments, n’est-ce pas ? On fait cuire de la terre cuite ou des matériaux – on peut créer des matériaux de construction, on peut travailler les pierres et durcir la pointe d’une lance, on peut fumer les aliments pour les conserver. Le feu s’avère très utile de tant de façons différentes ! Tu peux effrayer quelque chose de plus gros que toi qui te mangerait autrement. Donc c’est défensif, c’est offensif, c’est constructif, c’est utile.
2) Pour ce qui est des missiles, il suffit de penser à convertir l’énergie potentielle en énergie cinétique. Un arc – je tire la corde d’un arc, j’y mets une flèche – et j’envoie la flèche à 100 pieds ou 200 pieds ou 1 000 pieds ou n’importe quelle distance à laquelle je vais la lancer. Et si ce n’est pas ca, je le fais avec une fronde. Et je pense que l’idée essentielle ici c’est qu’il est très difficile pour nous de nous élever au-dessus d’une créature qui a des crocs plus acérés que nous. Et si quelqu’un est plus grand, plus fort ou plus coriace que nous, il faut s’en tenir à distance pour le battre. Donc celui qui maîtrise les missiles gagne – il a une grande portée. Non seulement tu peux reculer de 30 mètres et tirer quelque chose, mais tu peux aussi te tenir à 10 mètres d’une falaise et leur tirer dessus. C’est donc une bonne caractéristique de l’évolution que de maîtriser la capacité de diriger une arme énergétique à distance. Et c’est assez évident aujourd’hui : si quelqu’un a une arme à feu et que tu as un couteau, tu vas perdre. Et s’ils ont un fusil et que tu as un pistolet, tu vas perdre. Et s’ils ont de l’artillerie et que tu as un fusil, tu vas perdre. En finalement, celui qui peut larguer quelque chose sur votre tête depuis 15 000 mètres d’altitude va gagner. Donc les missiles se révèlent être assez critiques pour faire progresser l’humanité sur les créatures aussi. Et en définitive, la tribu la plus sophistiquée qui maîtrise les missiles les plus sophistiqués domine la tribu la moins sophistiquée, et cela continue jusqu’à aujourd’hui avec les missiles balistiques intercontinentaux. Et même l’initiative de la Guerre des étoiles, à laquelle nous attribuons le renversement de l’Empire soviétique, consistait soit à maîtriser la capacité de lancer un missile, soit à maîtriser la capacité de faire tomber du ciel un missile que quelqu’un d’autre t’a balancé.
3) Le dernier sujet, l’hydraulique, n’est en fait que la puissance de l’eau. L’eau est l’un des moyens les plus efficaces de canaliser l’énergie gravitationnelle. Les peuples anciens ont pris de l’eau et ont créé des moulins et des machines qui ont fonctionné ! Si tu as une chute d’eau – et qu’elle fait le travail de cent personnes – et bien ça peut t’être très utile, surtout si tu es une seule personne. Tu fais fonctionner le moulin et tu peux te détendre pendant que l’eau fait le travail. Donc je pense que la signification de tout cela c’est qu’il s’agit des débuts des systèmes énergétiques paléolithiques qui poursuivent un objectif différent. Et si vous les maîtrisez, vous construisez une civilisation. Et si vous ne les maîtrisez pas, dans le meilleur des cas, vous courez avec les animaux et vous n’êtes pas mieux lotis que les chimpanzés. Ou dans le pire des cas, si vous ne les maîtrisez pas et que la tribu voisine les maîtrise, elle vous assassine et c’en est fini de vous – vous êtes évincé de tout l’écosystème. Donc, je pense que lorsqu’on se met à prendre en compte tout ça, la grande idée c’est : La civilisation qui canalise l’énergie le plus efficacement gagne. Et je pense que c’était le thème du reste de la série de podcasts.
Robert Breedlove [20:00] : Oui, très bien expliqué. Donc la civilisation qui canalise le plus d’énergie le plus intelligemment gagne. Évidemment, ce sont des formes d’énergie primitives, mais très utiles pour bâtir une civilisation. Et pour revenir à ton premier point – l’argent serait la plus haute forme d’énergie qu’un humain puisse canaliser – si ce réseau d’énergie que nous appelons argent est monopolisé comme il l’a été tout au long de l’histoire, qu’est-ce que cela a comme effet sur cette plus haute capacité dont les humains disposent ? Par laquelle nous utilisons l’argent pour coordonner les actions des uns et des autres ? En quoi cette monopolisation perturbe-t-elle ce réseau énergétique que nous appelons l’argent ?
Michael Saylor [20:50] : Fondamentalement, la différence entre les réseaux monétaires et les réseaux d’eau sanitaire ou les réseaux de missiles ou les fourneaux à feu est que vous ne pouvez pas tromper Mère Nature. Donc, si vous créez un système d’aqueduc et que vous y mettez une fuite, vous finirez par obtenir deux fois moins d’eau, et si la fuite est conséquente, vous n’aurez plus d’eau. Et si vous ne pouvez pas déplacer l’eau, la ville de 50.000 personnes a assez d’eau pour 5.000 personnes et 45.000 personnes meurent et c’est tout. Et les gens se rendent compte que le maire de la ville a bousillé l’aqueduc quand ils ne peuvent plus rien boire – et ils meurent. Et c’est la même chose si vous bousillez votre chaudière et qu’elle brûle votre maison, ou si vous bousillez votre fourneau et que le feu s’éteint et que vous mourez de froid. On ne peut pas tricher là-dessus ! C’est assez évident, et ce n’est pas une question politique ! Personne ne dit : « Ce n’est pas juste que le feu se soit éteint » ou « Ce n’est pas juste que la citerne n’ait pas capté l’eau ». Lorsque quelqu’un vous tire dessus avec un missile ou vous envoie une balle depuis une fronde et que vous êtes là en train de saigner, personne ne dit : « Ce n’est pas juste ! La vérité est que la balle de plomb vole à travers l’atmosphère et qu’elle vous touche ou non. Ce sont donc des systèmes conçus et contrôlés par les lois de la physique. Et ils peuvent être brutaux, mais vous ne pouvez pas les gruger – vous ne pouvez pas élire un nouveau maire qui fait passer une loi disant que les balles ne fonctionnent plus et l’utiliser pour vous sauver de l’ennemi qui arrive par la crête. L’argent est différent : l’argent est une énergie sociopolitique. Ainsi, lorsqu’il fonctionne parfaitement, c’est une énergie économique, mais lorsqu’il est récupéré par une organisation politique ou centralisé – et lorsqu’il est corrompu – ça devient une énergie imparfaite.
Et donc si on examine l’argent à travers l’histoire, on a des pièces de monnaie lydiennes – et on écrit à leur sujet – mais l’histoire que vous lisez est constituée de 10 000 évènements : un peuple en conquiert un autre, il met sa ville à sac, il l’assiège, il tue tout le monde, il prend tout l’argent, il fait fondre toutes les anciennes pièces et il en fabrique de nouvelles. Ce sont les Spartiates qui se battent avec les Athéniens, les Lydiens, les Perses, les Romains, les Phéniciens et les Carthaginois, et ils ont tous leur propre système de monnaies. Et vous pouvez littéralement en trouver des milliers et des milliers – elles contiennent toutes de l’or.
En général, ce qui se passe, c’est que vous commencez peuple jeune et vertueux – les Romains – vous êtes jeunes et vous avez faim et vous conquérez les Étrusques, vous prenez tout leur or, vous prenez tous leurs biens, vous bâtissez votre propre monnaie. Et cette monnaie a une haute teneur en or, traditionnellement – si elle était sur un étalon-or – et ensuite vous l’utilisez pour construire une économie libre et l’économie fait du commerce et les gens créent des bateaux et ils créent des roues de chariot et ils créent des bâtiments et ils créent des armes et ils engagent des mercenaires ou ils paient des soldats et ensuite vous vous défendez. Et au fil du temps, vous vous développez – tant que la société n’est pas corrompue. Lorsque le système politique n’est pas corrompu, lorsque le système monétaire n’est pas corrompu, et que tout le monde a le sentiment qu’il est juste et équitable, cela incite les gens à se battre pour défendre leur foyer, parce qu’ils l’apprécient et l’aiment, et cela incite les hommes d’affaires à travailler dur, parce qu’ils savent qu’ils seront récompensés équitablement.
Ainsi, la ville ou la cité-état se développe, et continue de s’étendre jusqu’à ce que le fils ou le petit-fils ou le 13ème successeur du roi vertueux prenne le pouvoir, devienne paresseux, avilisse la monnaie – réduise la quantité d’or dans la monnaie de 30%, puis de 50% – et à mesure qu’ils réduisent et avilissent la monnaie, les gens commencent à perdre confiance dans le dirigeant et dans le système économique, puis ils commencent à tricher et/ou les gens ne veulent pas le défendre, et finalement les mercenaires veulent être payés plus et donc les taxes doivent augmenter et la monnaie doit être dévaluée et finalement les gens perdent confiance dans le système entier.
Et arrive un groupe de gens plus jeunes, plus affamés, plus vertueux, moins gras, moins stupides et moins contents, qui conquiert la civilisation corrompue plus ancienne, plus grasse, plus stupide et plus contente. Les livres d’histoire écrits par les perdants disent quelque chose comme : Ces méchants barbares sont venus et ont pris nos affaires sans aucune raison – n’est-ce pas déplorable ? Mais l’histoire est finalement réécrite par les vainqueurs – s’ils restent assez longtemps – en quelque chose comme: La civilisation qui a échoué était corrompue. Les Romains ont dit que les Carthaginois étaient corrompus. Et donc le vainqueur réécrit le livre d’histoire et il prend tous les biens corrompus et tous les systèmes défectueux et il les détruit ou les fait fondre et les réforme – et le cycle recommence. Et c’est pourquoi l’or qui se trouvait dans les pièces de monnaie lydiennes s’est probablement retrouvé dans les pièces de monnaie perses, athéniennes, romaines, vénitiennes, florentines, espagnoles, britanniques – tout au long de l’histoire, nous ne cessons de vivre ces hauts et ces bas. Et je pense que la grande idée ici est :
Je ne peux pas corrompre un aqueduc et je ne peux pas créer un avion corrompu. Vous pilotez un avion corrompu – comme Howard Hughes qui a imposé sa volonté au Spruce Goose, en construisant un avion trop grand avec des matériaux pas assez solides et un système de propulsion pas assez puissant. Et il a volé pendant – quoi …30 secondes – et puis il a cessé de voler ! Peu importe que vous soyez riche, égoïste ou que vous vouliez absolument quelque chose, ça ne volera pas si vous trichez avec les lois de la physique. Et pour l’argent ? Eh bien, ça va voler et vous pouvez faire des choses irrationnelles si vous avez le pouvoir brut – pendant un certain temps. Néron a pu agir comme Néron pendant environ 4 ans et finalement l’économie s’est effondrée et il a été assassiné. Et Caligula a fait la même chose. Donc, dans les cas extrêmes, vous pouvez être littéralement fou, cinglé et suspendre les lois de tout pour un certain nombre de mois ou d’années. Mais finalement, l’économie s’effondre, la société s’effondre et les gens perdent confiance en vous. À moyen terme, en général, 10 à 20 ans suffisent. Le Zimbabwe s’enfonce dans le sol depuis environ 40 à 50 ans. Vous ne pouvez pas le faire pendant 100 ans sans que tout le monde meure ou soit assassiné ou que la société s’effondre. Mais vous pouvez certainement corrompre un système monétaire avec des ingérences politiques pendant un certain nombre d’années.
Quand vous avez un dirigeant assez fort, il fait normalement s’effondrer la masse monétaire en 20 ans environ. Et si vous avez de la chance – si vous êtes la monnaie de réserve mondiale ou le leader mondial – peut-être tiendrez-vous 100 à 200 ans avant de détruire le système. Et je pense que la leçon à tirer de tout cela est la suivante : l’intégrité de l’ingénierie – l’intégrité physique – relier votre système à la physique du monde réel est la chose la plus sûre à faire, parce que tous les gouvernements finissent par être corrompus, toutes les entreprises sont corrompues, tout système géré par l’homme finira par être corrompu. Si ce n’est pas à la première génération, alors à la deuxième, à la troisième ou à la quatrième – et c’est vraiment inévitable ! Il est presque impossible de l’éviter parce que vous avez ce mème du genre : les temps difficiles font les hommes forts et les hommes forts font les temps prospères et les temps prospères font les hommes mous et les hommes mous font les temps difficiles. Il est très difficile, si vous avez réussi, de faire en sorte que vos petits-enfants soient tout aussi motivés. Gengis Khan l’a appris, Alexandre le Grand l’a appris et les Romains l’ont appris. Lord Acton a dit : « Le pouvoir absolu corrompt absolument. L’excès de quoi que ce soit finit par vous corrompre. Et la nature a une façon de résoudre le problème : on ne voit pas de prédateurs gras. Je regarde tous les beaux oiseaux et je me dis : « Ils sont tous beaux et ils sont tous très énergiques, gazouillants et heureux et ils volent – comment se fait-il qu’il n’y ait pas d’oiseaux corrompus, gras, stupides et heureux ? Et la réponse est la suivante : parce qu’ils ne durent pas plus de 48 heures dans la nature lorsqu’ils deviennent gros, idiots et heureux ! La nature élimine de l’écosystème tout ce qui ne fonctionne pas au maximum de ses performances, jusqu’au dernier vestige. Elle se débarrasse donc continuellement de l’irrationalité ou de la paresse.
Robert Breedlove [31:24] : C’est intéressant qu’on puisse presque dire que les fuites détruisent les réseaux d’énergie, et que pour les systèmes humains, la corruption équivaut aux fuites. L’inflation est évidemment une fuite de pouvoir d’achat – clairement corrompue – et elle finit par détruire la civilisation, car on ne peut pas tromper la nature comme tu le disais. Vous pouvez peut-être la tromper pendant un certain temps parce que c’est un système sociopolitique, mais on finit toujours par recevoir la « facture ». Et tout ce processus de fuite ou de corruption est vraiment contradictoire avec la tendance centrale de la nature, qui est la conservation de l’énergie, ou de suivre la stratégie la plus efficace en termes d’énergie – quelque chose dont nous avons beaucoup parlé dans cette série, ce qui nous permet de clarifier l’importance de Bitcoin. Mais on a vu cela se produire à maintes reprises, et comme tu l’as dit : la compromission du protocole monétaire par la corruption ou les fuites, entraîne l’effondrement d’autres protocoles et finalement les protocoles politiques et de nombreux autres domaines de l’histoire comme la Rome antique. Est-ce qu’on voit cela aujourd’hui ? Est-ce qu’on le vit aujourd’hui ? Il est clair que le protocole monétaire est corrompu. Il semble que le monde soit en train de s’effondrer à plusieurs niveaux. Penses-tu que nous traversons aujourd’hui l’une de ces ruptures historiques ?
Michael Saylor [37:26] : Oui, je pense que Saifedean a effectué un bon travail de recherche sur ce sujet : avant 2020, les États-Unis augmentaient la masse monétaire de 7%. On avait donc une fuite de 7 % par an, ce qui signifie qu’on perd la moitié de l’énergie du système tous les 10 ans – sur la monnaie de réserve mondiale – depuis 1971 certainement, et probablement depuis 1914 environ je pense. C’est donc une fuite d’environ 7 % par an – mais cette fuite elle était d’environ 14 % par an dans le monde en développement. Donc l’énergie a une demi-vie – ou l’argent a une demi-vie – de 10 ans pour les monnaies fortes, et de 5 ans pour les monnaies faibles. Et c’était le statu quo jusqu’en 2020. Et cela se manifeste de la façon suivante : parmi les nations faibles, la monnaie s’effondre environ tous les 20-25 ans. On a vu des effondrements monétaires, des effondrements financiers en Russie – il y en a eu un en 1996. On a vu des effondrements monétaires en Argentine à peu près tous les 20-25 ans. Et les pays faibles d’Afrique, d’Amérique du Sud et d’Asie voient leur système monétaire s’effondrer tous les 20 à 30 ans. Quant aux monnaies fortes, elles vont durer environ 50-100 ans – tout cela s’est accéléré en mars 2020 je pense, quand le taux d’inflation monétaire du dollar américain a doublé ou triplé. Il était de l’ordre de 15 à 20 % par an. Je crois que nous avons augmenté la masse monétaire de 20 % chacune des deux années suivantes – soit une dépréciation de 40 % de la monnaie de réserve mondiale en 24 mois.
Mais si on regarde ce qui se passe sur les autres monnaies, je crois que c’est encore plus bien inquiétant ! Regardez le cours des devises par rapport au dollar sur les 12 derniers mois : le yen japonais est en baisse de 23 %, le złoty polonais est en baisse de près de 19 %, le rand sud-africain est en baisse de 17 %, la livre sterling est en baisse de 16 %, le won est en baisse de 15 %, l’euro est en baisse de 15 %. Et même la monnaie chinoise – qu’ils contrôlent – est en baisse d’environ 8 % sur un an.
On constate donc que la monnaie la plus forte – le dollar – perd actuellement environ 15 % ou plus de son pouvoir d’achat par an ! Comment puis-je le savoir ? Eh bien, le CPI – indice des prix à la consommation et le PPI – indice des prix à la production en dollars gravitent autour de 8,5 % à 9 %, mais le CPI et le PPI sont des mesures manipulées et déformées de la véritable inflation monétaire, car on sélectionne de façon biaisée un sous-ensemble de produits et de services qu’on mesure d’une manière assez dirigée. Une conclusion raisonnable est qu’ils sous-estiment certainement l’étendue de l’inflation monétaire, probablement de moitié, car les biens rares et désirables ne sont pas inclus. Nous savons que le prix les maisons unifamiliales américaines a connu une hausse de 40 % en 24 mois et pourtant, l’inflation indique qu’elles n’auraient augmentées que de 12 % ou quelque chose comme ça. Donc, globalement, le système de monnaie fiduciaire perd de l’énergie à un rythme plus rapide. A un taux d’inflation monétaire de 15%, l’argent a une demi-vie de moins de 4-5 ans.
Et la monnaie or ? Si vous avez un étalon-or parfait et que l’approvisionnement en or gonfle de 2% par an, la monnaie or a une demi-vie de 35 ans. Donc le mieux que vous puissiez faire est une demi-vie de 35 ans. Et dans une économie de marché qui croît de 2 % par an en termes réels – si vous avez un étalon-or parfait et que l’argent a une demi-vie de 35 ans – vous obtiendrez une stabilité des prix, parce que l’argent perdra 2 % de sa valeur par an, mais l’offre de biens et de services augmentera de 2 % par an et ils se compenseront ! Ça c’est l’âge d’or idéal : un étalon-or avec une économie où l’ingérence est minimale.
Maintenant, si tu as une économie qui croule sous le politiques publiques – si tu as une politique étrangère, une politique médicale, des politiques commerciales, des politiques énergétiques, des politiques du travail, des politiques d’éducation, des politiques de communication – qui interfèrent toutes avec le libre marché, alors bien sûr l’offre de biens et de services s’en trouve considérablement réduite par rapport à la production théorique d’un libre marché sans toutes ces politiques. Et si tu combines cela avec une politique monétaire qui augmente la masse monétaire de 40%, tu vas te retrouver avec une inflation extrême dans certaines régions. Ce que tu as vraiment, c’est trois niveaux dans le monde : tu as 1) l’économie américaine et la monnaie américaine – qui est la plus forte – c’est la monnaie de réserve mondiale, tu as 2) l’Europe et la Pologne et nos alliés en Corée et au Japon – ils sont plus faibles, ils sont en quelque sorte liés à nous mais ils perdent 10 à 20% de leur valeur par rapport à notre monnaie, et tu as 3) les monnaies des pays en développement comme le peso et la lire turque, et bien sûr elles s’effondrent de 50% par an ou plus. Et ce que tu vois, c’est bien sûr le chaos au Liban, tu vois le chaos au Sri Lanka – où le gouvernement va littéralement s’effondrer – ou au Liban, quelqu’un qui fait une prise d’otages dans une banque afin de récupérer son propre argent. C’est triste – c’est un triste mème pour l’époque.
Eh bien, je pense que tout cela est révélateur du problème structurel que posent les fiats, les devises politique, la monnaie politique. Et ça a empiré ! Aussi mauvais que cela ait été à partir de 1971 – c’est comme si on pouvait distinguer les périodes : 1870-1914 : l’étalon-or raisonnablement stable, peut-être – mais pas parfait ! S’il était parfait, il aurait été un étalon Bitcoin dans ces années-là et la valeur de la monnaie aurait gagné 2 à 3% chaque année au lieu de rester constante. Mais c’était l’approximation mécanique la plus proche ! C’est comme une montre mécanique par rapport à une montre numérique : la montre numérique est toujours plus précise, mais les très bonnes montres mécaniques sont plutôt bonnes à quelques secondes près. On avait donc une bonne solution mécanique pour cette période.
Ensuite, je pense qu’on est passé à l’étalon de réserve d’or de 1914 à Bretton Woods, sur la base du traité de Gênes. Et là, l’argent a commencé à perdre de sa valeur et on a connu des crises comme la Grande Dépression qui en a découlé, et finalement la Seconde Guerre mondiale. Ensuite, Bretton Woods nous a fait évoluer vers un standard de réserve d’or, mais avec les États-Unis comme seule contrepartie et tout l’or à Fort Knox. Et je crois qu’alors on a commencé à gonfler la monnaie – certainement plus rapidement. On avait un faux étalon de réserve d’or, mais je ne pense pas qu’on l’aie respecté. Et on a certainement augmenté la masse monétaire à un rythme de plus de 2 % par an – plus probablement 7 % par an en moyenne. Et puis on arrive à Nixon qui abandonne l’étalon-or et ça continue à 7% ou plus. Et puis nous voilà arrivés à 2020, où en quelque sorte on a jeté toutes sortes de règles et on a simplement doublé – peut-être triplé – le taux d’inflation monétaire aux États-Unis et on l’a peut-être piétiné pendant environ 2 ans.
Et je pense que là, en 2022 on est juste en train de passer par cette énorme transition où je crois que les politiciens ont réalisé que gonfler la masse monétaire de 20% par an dans le monde occidental c’était pas durable. Je pense qu’ils l’ont compris, et c’est pour cela que les taux d’intérêt sont relevés et qu’on a ce resserrage, et c’est pour cela que vous avez tous ces actifs à risque qui s’échangent et ainsi de suite. Mais c’est quoi la conclusion ? La conclusion c’est que on s’est mis d’accord sur le fait qu’on allait pas gonfler la masse monétaire de 21 %, mais que on allait probablement la gonfler de 14 % par an. Il est hors de question de revenir à une inflation de 7 % par an ! Je pense donc qu’on va probablement atterrir là où nous pensions atterrir, soit quelque part dans la fourchette du double pour les quatre prochaines années, ou quelque chose comme ça : peut-être 14 % aux États-Unis.
Mais d’autres monnaies sont pires : au Japon, ils essaient de fixer le taux à 10 ans à 25 points de base, et c’est pourquoi leur monnaie s’effondre par rapport au dollar. L’histoire n’est pas terminée – on verra ce qu’il en est – mais l’essentiel est que, depuis 30 ans, tout le monde savait que le dollar américain n’était pas une réserve de valeur à long terme, et tous se sont tournés vers des indices comme l’indice S&P et ont utilisé les actions comme réserve de valeur – ou l’immobilier comme réserve de valeur. Si l’on se projette dans les 20 prochaines années, je pense que les gens se rendent compte que dans un environnement où le taux d’inflation monétaire atteint 15 % par an, les actions ne semblent plus être une si bonne réserve de valeur, car elles dépendent des flux de trésorerie.
Et donc il faut maintenant se demander quelle est ta réserve de valeur de propriété. Vas-tu utiliser l’immobilier ? Et si oui, où vas-tu placer cet immobilier ? Ou alors tu vas utiliser quelque chose comme le Bitcoin comme réserve de valeur ? Et l’effondrement – il y a cette phrase, Si vous voulez faire bouillir une grenouille, vous devez augmenter la température lentement – et bien il s’avère que tu peux faire bouillir les gens à 7% par an si tu leur dis que c’est 2% par an, et la plupart des gens vont serrer les dents et ila vont se démener.
Seuls les plus gens les plus sensibles et les plus sophistiqués se rendront compte qu’on les fait bouillir à 7 % par an au lieu de 2 % par an. Robert, je ne l’ai pas réalisé, de 2010 à 2020 ! Ça m’est pas venu à l’esprit que le taux d’inflation monétaire réel était de 7 % – j’ai gobé le message politique comme quoi on était à 2 % ou autre et j’ai culpabilisé. Je me suis dit : « Je dois juste bosser plus dur, qu’est-ce qui va pas chez moi ? Mais le truc c’est que si tu fais grimper le taux d’inflation à 20-25 % en 12 mois, ça devient beaucoup plus difficile à ignorer.
Donc à ce stade, beaucoup plus de monde est sensibilisé – pas tout le monde ! Peut-être que 1 à 2 % ont été sensibilisés entre 2010 et 2020, et puis peut-être que maintenant on est passés à 5 à 10 % de personnes sensibilisées entre 2020 et 2022, et maintenant on est come en mission pédagogique pour sensibiliser le reste du monde. Ecoutes, Ayn Rand a dit il y a 50-60 ans : Ma mission est de séparer l’économie de l’État. Et les idéologues l’ont bien compris à l’époque : les Milton Friedman du monde entier l’ont compris, il y a une école d’économie de Chicago qui a fait campagne là-dessus, tout comme von Mises et Friedrich Hayek – mais, ils ne disposaient pas de la technologie pour résoudre le problème !
Il s’agissait donc d’une philosophie, et ta seule méthode pour l’aborder c’était la politique – c’était un problème qui devait être résolu dans le domaine politique : si tu pouvais te faire nommer à la tête de la Fed ou si tu pouvais devenir président des États-Unis ou être Paul Volcker, alors peut-être que tu pouvais prendre des mesures en faveur d’une monnaie saine ou basés sur des principes d’ingénierie thermodynamiquement sains – peut-être. Peut-être que tu pouvais – mais il fallait que tu sois un politicien. Ce n’est que lorsque Satoshi nous a donné Bitcoin qu’on a eu une technologie virale qu’on pouvait intégrer à un téléphone portable ou à un site web, et qui pouvait nous aider à attaquer ce problème ou à le résoudre. C’est pour ça que je dis, Bitcoin est l’espoir.
Je pense que ce problème on l’a toujours eu – on l’a eu il y a 10 000 ans ! On a eu ce problème sous les Lydiens. On dit: « Ah oui, ils ont été conquis par un peuple supérieur ». Eh bien, voici une autre interprétation : ils se sont corrompus et ils ont été conquis par des peuples pas encore corrompus, se trouvant à un stade plus précoce de leur cycle de vie, avant que ces peuples ne soient eux-mêmes corrompus ! On a ainsi la grandeur et la décadence des empires, encore et toujours. Je crois que von Schliemann, quand il a trouvé l’ancienne Troie et qu’il l’a déterrée, il a trouvé 19 autres anciennes Troies sous celle qu’il avait déterrée ! Les gens ont donc construit et démoli, reconstruit et démoli, et reconstruit et redémoli pendant des milliers, des milliers et encore des milliers d’années – c’est la condition humaine.
Ca fait réfléchir : on a du construire nos maisons en argile et il était inévitable qu’elles soient détruites par une tempête et nous on a du continuer à reconstruire. Combien de fois t’as t-il fallu reconstruire une maison en bois au même endroit pendant les 10 000 années passées? Un grand nombre de fois ! Le problème c’est pas tant les aspirations humaines – les humains ont toujours voulu construire une belle maison sur une colline – le problème c’est le suivant : tu construis la maison sur une colline avec du bois et il pourrit. Et au bout de 50 à 100 ans, elle est démolie ou détruite par le vent – et il faut recommencer, recommencer et recommencer encore. C’est l’absence de matériau doté de l’intégrité structurelle permettant d’atteindre cet idéal qui a constitué cette tragédie humaine.
Avec Bitcoin, nous disposons maintenant d’un matériau. Et si tu associes l’idéologie au matériau et que tu l’intègres dans une entreprise ou dans un système politique – tu peux l’intégrer dans une monnaie, tu peux l’intégrer dans une entreprise, tu peux l’intégrer dans un produit ou un service, tu peux l’intégrer dans une famille, tu peux l’intégrer dans une sécurité, tu peux l’intégrer dans un truc – et tu peux alors tirer parti de l’intégrité structurelle supérieure de Bitcoin afin d’obtenir un truc qui est combien de fois meilleur ? Si l’or a une demi-vie de 35 ans, si une monnaie fiduciaire bien gérée a une demi-vie de 10 ans, si une monnaie fiduciaire mal gérée a une demi-vie de 5 ans, et bien Bitcoin a une demi-vie éternelle ! Ce n’est pas 100, pas 200, pas 1 000, 10 000, ou 100 000 ans. Et si je te disais : construis une maison en bois, elle durera 35 ans, et que je te disais ensuite : » Oh, au fait, tiens voilà un nouveau matériau qui durera 1 000 ans – construis une maison avec ça ! La société tout entière serait vraisemblablement beaucoup plus riche parce que tu n’aurais pas à reconstruire la ville tous les 100 ans ou tous les 50 ans – le coût de l’entretien diminue, les choses ne se cassent pas, et tu peux alors rediriger l’excédent pour l’épanouissement humain et le progrès.
Robert Breedlove [54:09] : Magnifiquement dit. Toute cette perspective que tu as partagée avec le monde entier sur l’argent en tant qu’énergie montre vraiment à quel point, je pense, nous sommes le reflet de nos systèmes. On pourrait peut-être modifier la phrase de Lord Acton et dire que « l’argent corrompu corrompt absolument ». Et plus la fuite, la corruption ou l’inflation s’installe rapidement, plus vite le système s’effondre. C’est une chose qu’on a vu à plusieurs reprises. Et je pense que l’opposé de la fuite ou de la corruption pour un protocole monétaire serait la standardisation. Une norme qui lie tout le monde universellement est presque par définition une norme incorruptible, une restriction universelle – quelque chose comme la thermodynamique ou la gravité – des règles que nous devons tous respecter. On en a parlé un peu dans la série, du fait qu’il existe des avantages darwiniens ou concurrentiels majeurs qu’une société peut débloquer par la normalisation, la standardisation des protocoles. Et en ce qui concerne la monnaie, l’or nous a donné une approximation d’un protocole standardisé – comme tu l’as dit, environ 2 % par an – mais clairement c’était encore loin d’être idéal. Et l’étalon-or n’a jamais vraiment fonctionné non plus, car il a toujours fini par être corrompu par l’appareil politique bâti dessus. Alors comment vois-tu les avantages potentiels d’une standardisation mondiale sur une monnaie incorruptible comme Bitcoin ? Quel type de gains penses-tu que l’humanité puisse libérer grâce à cette transition ?
Michael Saylor [55:58] : Je pense qu’on a tout simplement une hémorragie de plusieurs billions de dollars par an, quelque chose comme 10 billion de dollars d’inefficacité dans l’économie chaque année parce que le système monétaire est cassé – l’unité de compte est détruite. Et donc, à quoi je m’attends ? Je m’attends à ce que la production économique double ! Si tu as déjà dirigé une entreprise, tu te rends compte que le défi dans une entreprise c’est de bâtir des systèmes qui imitent la gravité. La beauté de la gravité est la suivante : il y a 8 milliards de personnes sur la planète, et le haut est le haut pour tout le monde, et le bas est le bas. Et si une personne laisse tomber quelque chose, l’objet qu’elle laisse tomber descend immédiatement sous l’effet de la force de gravité – les constantes gravitationnelles sont toutes les mêmes. Elles ne sont pas politiques, il n’y a pas d’appel, de recours, aucun avocat ne s’en mêle, il ne faut pas 6 mois pour déterminer dans quel sens la chose que vous laissez tomber doit tomber, pas besoin de 100 avocats pour déterminer si elle doit arrêter de tomber ! Parce que la gravité est universelle et qu’il existe une constante universelle, alors je peux construire une maison, un ascenseur et une voiture, je peux être gymnaste, il y a le bien et le mal et je peux être puni – ils se passe des trucs ! Et il n’est pas nécessaire d’envoyer un mémo à 8 milliards de personnes pour leur dire comment traverser une pièce, comment sauter de haut en bas, comment jouer au basket-ball ou comment dire au ballon comment rebondir – ça marche tout simplement.
Dans les entreprises, vous n’avez pas cette situation. Alors souvent, quand vous êtes PDG, vous vous grattez la tête en vous disant : « Comment puis-je encourager les 2 000 personnes à faire ce qu’il faut ? Si un client appelle et qu’il est mécontent, comment puis-je encourager 2 000 personnes à faire ce qu’il faut sans demander au patron du patron du patron du patron du patron ce qu’il faut faire ? Comment m’assurer que le phénomène naturellement sain se produise ? L’eau descend la pente – vous n’avez pas à dire à l’eau dans quelle direction aller. Ainsi, dans les entreprises, on passe beaucoup de temps à construire des systèmes standard pour dire aux gens comment se comporter, et on espère l’intégrer dans l’ADN réflexe de l’entreprise pour qu’elle soit saine – mais c’est vraiment difficile ! Et je crois que c’est la même chose dans une civilisation, une nation ou une ville : comment bâtir une économie pour que chacun fasse ce qu’il faut pour les autres, rationnellement et naturellement, sans qu’on lui dise quoi faire ? Et le protocole standard, s’il est décentralisé – la gravité est le protocole décentralisé, tout comme la friction – mais le langage et les mathématiques le sont aussi, d’une certaine manière. Il y a une forme de mathématique et elle fonctionne – n’importe qui peut additionner 2 + 2 = 4 et si tu dis 2 + 2 = 5 et que tu essaies de le dire à ton frère et que tu le trompes, il te donne un coup de poing ! Et tu comprends que peut-être 2 + 2 ≠ 5. Et si tu triches dans une affaire commerciale en tordant les mathématiques, tu es puni. Et si tu essaies de tromper la Nature en faisant croire que tu as quatre poulies là-haut alors qu’en fait il n’y en a que trois et que le système ne fonctionne pas, alors tu as un feedback. Nous avons donc ces systèmes : physique, mathématiques, langage.
La langue anglaise est bonne. Je peux te dire : « Robert, je t’aime bien », et ces mots ont un sens pour toi et ils ont un sens pour moi. Mais si je décidais unilatéralement de dire : « Robert, je te déteste vraiment – mais si j’ai redéfini le mot « détester » pour qu’il soit équivalent au mot « aimer », et si je suis le seul à l’avoir fait, tu me regarderais bizarrement et tu ne voudrais pas interagir avec moi parce que tu penses toujours que « aimer » signifie « aimer » et que « détester » signifie le contraire de « aimer ». Donc je ne peux pas redéfinir le protocole anglais, même si j’avais envie de le faire. C’est comme l’empereur dévêtu : être riche ou puissant ne signifie pas que tu peux réécrire ta propre langue – tu vas te détachez de la civilisation. Donc avec la monnaie la clé c’est : tu veux un protocole standard. Et si tu en as un défectueux – comme, pense à comment les chose se passent au Zimbabwe en ce moment ? Quand tu as une monnaie qui s’effondre pendant la République de Weimar – dans ce cas, les gens sont tellement préoccupés par ce qui se passe la semaine prochaine qu’ils n’ont pas le temps de penser un an à l’avance, et encore moins une décennie ou 100 ans à l’avance. Donc [à partir d’] un système standard qui est incorruptible, qui est diffus partout est – raisonnablement parlant, je ne vois pas comment vous arrivez à la conclusion que l’économie ne fonctionne pas à 50% d’efficacité avec le système monétaire actuel. Ou moins !
On est clairement en deuxième vitesse, pas en quatrième. Et tu peux même soutenir que l’économie fonctionne à 10% d’efficacité. Pour en revenir à ce que je disais : si je t’interdisais d’utiliser l’acier et le verre à New York, pourrais-tu bâtir ? A quoi ça ressemblerait ? Si tu retournes en arrière et que tu regardes toutes les îles de la Méditerranée, l’île compte 50 000 habitants aujourd’hui, mais dans l’Antiquité, elle en comptait 5 000 – parce que ça correspond à la quantité d’eau qui tombe sur l’île. Alors que se passe-t-il si je t’enlève to système énergétique sophistiqué ? Oh, eh bien 90% des gens meurent. Est-ce qu’il y a un moyen d’y échapper ? Non ! Aucun moyen de contourner cela – du tout ! et donc je crois que le système énergétique est essentiel.
Je suppose que l’autre métaphore organique c’est celle du sang et des saignements, pour un athlète. Et ce que nous savons, c’est que si tu veux être un athlète de haut niveau et que tu veux gagner tes triathlons, ton Iron Mans ou quoi que ce soit – pour simplement courir à un niveau de performance optimal – tu ne peux pas te permettre de te saigner. Il faut un mois pour récupérer après avoir donné un demi-litre de sang. Tu peux donc peut-être donner un peu de sang une fois tous les deux mois, mais c’est à peu près tout ce que tu peux faire. Si je te saigne toutes les semaines, tes performances athlétiques se détériorent en permanence. Si je te saigne tous les jours, je te tuerai probablement – si je te saigne assez vite. Alors, quel est le coût de la perte de 20 % de ton énergie par an ? Et comment cela s’accumule-t-il ? Et à quel moment cela provoque-t-il l’effondrement du système ? C’est comme un triage élémentaire – la phrase la plus célèbre en médecine est : Arrêtez l’hémorragie. Il faut d’abord s’assurer que l’on respire, puis arrêter l’hémorragie, et enfin s’occuper du problème.
Et l’argent – l’inflation monétaire c’est le saignement, et la société saigne – elle a toujours saigné. Depuis toujours ! Et ça a saigné plus ou moins selon les périodes, mais je dirais qu’actuellement, on est dans une situation assez difficile où il n’est pas raisonnable de penser que l’économie va progresser. En fait, l’idée la plus importante ici est que la façon dont on mesure l’inflation est défectueuse. Le CPI n’est pas l’inflation, car c’est une mesure déformée. Mais la façon dont on mesure la production économique est également faussée ! Le PIB – la taille nominale de l’économie – est faussé. Si je réduis de moitié le nombre de vols des compagnies aériennes, mais que je double le prix d’un billet ou que j’augmente le prix d’un billet de 110 %, je peux vous représenter que l’industrie aérienne est 10 % plus grande mesurée en dollars. Mais, bien sûr, elle est deux fois moins importante en termes de vols réels ou de passagers-kilomètres.
Et donc l’économie réelle est en récession – par compression, elle s’est probablement réduite de 10 à 20 % par an au cours des deux dernières années – mais nous on dit que l’économie est en légère croissance. Pendant toutes ces années où nous avons augmenté la masse monétaire de 7 % quand l’économie augmentait de 3 % seulement, que s’est-il réellement passé ? Réfléchis-y bien ! L’économie réelle n’est pas en croissance – la disponibilité des biens et des services, le délai de livraison et l’utilité de ces services se détériorent, même si on peut fabriquer une mesure nominale nous indiquant que l’économie est en croissance. Donc ça c’est la longue réponse à la question. Si on résume on a : l’économie est paralysée parce que l’argent est défectueux. Et quand est-ce que Bitcoin sera 10x plus gros ou 100x plus gros qu’il ne l’est maintenant ? 80% de l’économie sera paralysée avec 80% d’argent défectueux ! Donc on va se retrouver avec une économie mondiale paralysée pendant un long moment. Et si tu te demandes quels en sont les signes, il suffit de regarder dans le monde entier : regarde ce qui se passe au Sri Lanka, regarde le problème en Chine quand ils font te sauter 30 immeubles d’habitation vides, regarde les problèmes que nous avons en Amérique du Sud, regarde les bidonvilles, regarde la dégradation urbaine, regarde la criminalité. On a tout ça autour de nous, et ce sont tout simplement des signes de systèmes énergétiques corrompus et défectueux qui ne fonctionnent absolument pas.
Robert Breedlove [1:06:32] : Brillamment dit. Michael, je ne veux abuser de ton temps – as-tu le temps pour une dernière question ?
Michael Saylor : Oui, bien sûr, allons-y pour une autre !
Robert Breedlove : D’accord, ce que je t’entends dire, c’est que Bitcoin est, à bien des égards, le premier véritable terrain de jeu que nous ayons jamais eu, à l’exception de quelque chose comme la gravité, la thermodynamique, etc. Je veux dire des règles qui nous lient universellement – qui ne peuvent pas être corrompues, qui ne peuvent pas être brisées. L’anglais est peut-être une bonne approximation de cela.
Michael Saylor [1:07:09] : C’est ce que je pense ! Tout le monde peut apprendre l’anglais et on utilise les mots, I love you, partout dans le monde – ils signifient la même chose. Et peut-être que le système évolue légèrement ou se corrompt avec le temps, mais c’est une évolution décentralisée qui est juste et équitable pour tout le monde. Et juste à la périphérie, on invente parfois de nouveaux mots et on se bat pour savoir si on les aime ou pas.
Robert Breedlove : Oui. Donc ça fonctionne, et même si ça subit des attaques – certains politiciens et autres essaient peut-être d’attaquer le langage et de changer les significations à certains moments.
Michael Saylor [1:07:44] : Les mathématiques arabes sont meilleures ! La signification du mot : un deux trois quatre cinq six sept huit neuf et dix. Et c’est assez stable et décentralisé depuis environ 1 000 ans.
Robert Breedlove : Oui, sauf si tu es un postmoderniste et que pour toi 2 + 2 ≠ 4. Mais Bitcoin semble être un langage de la valeur entièrement hors de portée de la corruption parce que tu ne peux tout simplement pas le contester – tout ce qui est sur ce grand registre est, tout simplement ! Tu en es le propriétaire. Ca c’est produit. Donc oui, c’est une façon très importante de voir les choses. Et ça m’amène à cette question suivante : tu as conclu les 9 premiers épisodes – nous avions alors centré la discussion sur l’intervention des êtres humains dans des systèmes dynamiques tels que l’économie nationale. Et tu avais conclu l’épisode 9 en disant que nous avons essayé de transformer la nature en zoo. C’était dans un sens une fin assez obsédante, et il semble que la construction du zoo se soit accélérée récemment. Comment pouvons-nous nous libérer de cela ? Comment nous empêcher de devenir des animaux de zoo ? Si tu veux utiliser cette analogie ! Comment pouvons-nous nous libérer et tendre vers notre humanité supérieure dans le futur ?
Michael Saylor [1:09:11] : Je pense qu’il y a beaucoup de leçons à tirer des sciences environnementales et de l’écologie. J’ai un bout de littoral vivant que je contemple parfois. Un littoral vivant, c’est un endroit où l’on crée un revêtement pour empêcher les vagues ou l’eau d’emporter ou d’éroder la berge. Il faut prévoir des brèches dans ces revêtements pour permettre à l’eau de la marée d’entrer et de ressortir afin de nettoyer le rivage et pour éviter l’accumulation d’eau stagnante et le développement de bactéries qui tuent tout. Il faut donc une circulation continue et il faut être en relation avec la nature ! Nous avons cette phrase : Ce n’est pas naturel. Ou : c’est naturel, qui signifie en quelque sorte que c’est une bonne chose – Ce n’est pas naturel signifie que ce n’est pas nécessairement une bonne chose. Je crois que les créatures de zoo vivent plus longtemps en captivité, mais elles finissent par devenir grosses, aveugles et édentées, et elles ne peuvent pas se débrouiller seules – il faut les nourrir. Et au fil du temps, si vous commencez à conclure que le lion en bonne santé est ce lion gras et édenté qui doit être nourri par sonde, alors vous avez une vision assez déformée de la vertu. Et donc, étudier les lions du zoo n’est probablement pas une bonne idée. Et si vous décidez de vous domestiquer, la question se pose alors : Qui est votre gardien de zoo ? Et quand se lassera-t-il de vous et cessera-t-il de vous nourrir par le tube ? Et arrêtera-t-il de vous protéger ? Et dès qu’ils arrêteront, vous allez mourir.
Donc le problème avec tous ces systèmes – tous les systèmes monétaires – est que nous essayons de créer ces systèmes artificiels. Comme les systèmes de preuve d’enjeu – proof of stake : vous essayez de créer un système informatique et vous faites confiance à quelques ingénieurs en informatique pour le rendre honnête et vertueux. Et dès que l’un d’entre eux a une bonne idée – et ils continuent à avoir de bonnes idées – ils continuent à charger idée après idée après idée et vous vous retrouvez avec cette idée de canard-requin qui vit dans les arbres qui n’a aucun sens, mais parce que vous avez un être tout-puissant dans l’écosystème qui a le droit d’aller de l’avant et de mettre un nez de 187 pieds et 137 ramures sur un canard-requin et vous ne pouvez pas l’arrêter, il n’y a pas de mécanisme de feedback pour signaler que 137 bois sur un canard-requin lui rend impossible la nage ou le vol. Donc la façon dont tu évites de créer ces monstruosités est de te soumettre à la rigueur naturelle de façon constante. Et Bitcoin se soumet à la rigueur naturelle parce que tu dois générer des hachages SHA-256 et tu dois les générer de manière constante avec de l’énergie. Et si tu commences à enfreindre les règles, tu ne peux pas générer les hashs. Ou si tu prends du retard et que tu disposes d’un équipement ancien et désuet, tu ne peux pas te permettre de rivaliser avec les nouveaux équipements modernes. Il y a donc un remplacement incessant de l’ancienne génération par la nouvelle, et les paresseux et les incompétents sont évincés du réseau par les plus jeunes et les plus agressifs. Une personne qui perd son argent parce qu’elle a perdu ses clés ne le récupère pas simplement en faisant appel à l’autorité – elle le perd et c’est une contribution de son énergie à tous les autres membres de l’écosystème. Bitcoin est donc naturellement conçu pour être organiquement sain, de la même manière qu’une créature dans la nature ne peut qu’être saine !
Tu ne peux pas réguler longtemps ta température corporelle à 37 degrés Fahrenheit – 3 degré celsius – avant de mourir tout simplement. Peu importe à quel point tu souhaiterais le faire – tu ne peux tout simplement pas le faire! Et c’est la discipline brutale de la nature. Et le résultat est le suivant : tu as cette rétroaction, puis tu as une évolution darwinienne constante vertueuse – et c’est ainsi que la vie continue. Donc je pense que la recette pour donner de la vertu à un système monétaire c’est : tu dois le brancher sur la nature. L’or était connecté à la nature d’une manière détournée – pas parfaite, parce qu’on pouvait mettre une ville à sac et gonfler l’offre d’or, ou on pouvait trouver plus d’or et mentir sur la qualité de l’or et on pouvait centraliser l’or et le saisir – donc, pas parfait, mais il y avait une certaine relation thermodynamique avec la nature, la matière et l’énergie. Et je pense que Bitcoin atteint cette relation thermodynamique via le minage, par la preuve de travail. Et c’est ce qui le rend sain : le fait qu’il s’agisse d’un protocole ouvert et décentralisé le rend incorruptible – beaucoup beaucoup beaucoup plus difficile à corrompre que quelque chose qui est naturellement centralisé. Et donc je pense que c’est comme les mathématiques arabes. C’est comme une langue anglaise standard. C’est comme certains autres protocoles comme TCP/IP et autres – c’est un protocole de base pour bâtir une civilisation. Et c’est une merveilleuse réussite !
Et tout comme on ne peut guère espérer progresser sans maîtriser l’écoulement de l’eau, la mécanique, le feu ou l’électricité, on ne peut pas vraiment espérer faire évoluer les systèmes politiques socio-économiques de l’humanité sans maîtriser la monnaie, ou l’ingénierie monétaire. Je pense donc qu’un jour, nous verrons une matière appelée ingénierie monétaire qui sera enseignée dans les écoles d’ingénieurs du monde entier, et nous saurons que nous avons réussi lorsque vous aurez le choix entre étudier l’ingénierie électrique, l’ingénierie nucléaire, l’ingénierie aéronautique ou l’ingénierie monétaire….
Robert Breedlove : Merveilleusement dit. Oui, la rétroaction constante, continue, l’apprentissage, le travail honnête, semble être dans ce monde la voie à suivre pour le succès individuel et collectif. Michael, merci pour ton temps – ton éloquence, toute ton implication – la peau que tu mets en jeu – encore une fois, la série Saylor commence à l’épisode 1 du What is Money Show. C’est sur YouTube et whatismoneypodcast.com, et le livre Saylor Series est maintenant disponible en version brochée, cartonnée et Kindle sur Amazon. Michael, merci encore.
Michael Saylor : Oui, merci de faire ça avec moi, Robert. J’ai vraiment apprécié ! J’espère que les gens vont en retirer quelque chose et trouveront des moyens de l’utiliser pour inspirer les gens autour d’eux ou améliorer leur propre vie. J’attends avec impatience vos commentaires et vos réactions. Et d’ici là : allons de l’avant et toujours plus haut !
Robert Breedlove : En avant et toujours plus haut ! Merci beaucoup.