Les bitcoiners ne sont pas toxiques : ils sont intègres

Tomer Strolight 
Rédacteur en chef, Swan.com – Blurb
La seule façon d’apprendre est de commencer par s’admettre à soi-même : « Je ne sais pas ». C’est aussi la seule façon d’être libre.

Publié sur Medium, le 18 mai 2021
Traduction : @Jacques_BTC

Version audio

La différence entre « toxicité » et « intégrité » est dans l’œil de celui qui regarde, et le choix de l’étiquette en dit beaucoup plus long sur celui qui regarde que sur les personnes sur lesquelles il appose cette étiquette.

Ma lecture de cette article et ma discussion à son sujet dans l’émission « Smart People Shit » peuvent être visionnées ici ou écoutées ici.

Les bitcoiners sont souvent accusés d'être « toxiques »

En l’espace de quelques jours, entre le 14 et le 16 mai 2021, un événement intéressant s’est produit qui peut nous en apprendre beaucoup sur la communauté Bitcoin. Les bitcoiners se sont massivement retournés contre Elon Musk, ce héros populaire, l’encourageant à quitter Bitcoin et à revendre ses milliards de dollars de bitcoins (y compris ceux détenus par Tesla).

Les médias se sont alors empressés de qualifier cet événement de nouvelle manifestation de la toxicité des bitcoiners et, comme d’habitude, les gros titres se sont encore une fois trompés sur notre compte. J’écris donc ceci pour remettre les pendules à l’heure.

Voici le tweet de Lex Fridman, un honnête outsider de Bitcoin, qui présume que la communauté est dotée d’un trait de caractère qu’il qualifie de « toxicité » et que c’est une mauvaise caractéristique parce que cette toxicité « a écarté de Bitcoin beaucoup de gens que je connais, y compris Elon Musk ». Le tweet de Lex sous-entend également que ces personnes qu’il connaît auraient constitué un atout pour Bitcoin. Sinon, pourquoi qualifier de bug cette « toxicité » qui les a fait fuir ?

Les bitcoiners sont-ils fous ?

On peut dire ce que l’on veut des bitcoiners et de leurs théories économiques, mais il n’y aucun doute sur le fait que chacun d’entre nous savait que si Tesla vendait ses milliards de dollars de bitcoins, son prix chuterait immédiatement, tout comme notre richesse mesurée en dollars. Nous savions tous que le simple fait d’encourager cette vente inciterait d’autres « investisseurs » en bitcoins à vendre leurs bitcoins en prévision de cette éventualité, ce qui provoquerait également une baisse de notre fortune. Et pourtant, nous étions là, en masse, sur Twitter, à exhorter l’homme le plus riche du monde à prendre une mesure dont nous savions qu’elle aurait un impact négatif sur notre patrimoine.

Si, en considérant tout cela, vous vous posez la question « Mais pourquoi donc un groupe de personnes serait-il prêt à faire quelque chose qui leur ferait perdre de l’argent ? », permettez-moi de vous proposer une réponse qui vous semblera peut-être assez impénétrable au premier abord : Pour les bitcoiners, il y a beaucoup de choses plus importantes que la fortune, en particulier la fortune à court terme, surtout si elle est mesurée en dollars.

Je ne me contente pas d’affirmer cette réponse en m’attendant à ce que vous l’acceptiez telle quelle. Je vais vous la prouver. Et ce faisant, j’espère pouvoir vous montrer que ce que certains considèrent comme un « bug » autour du Bitcoin, qu’ils qualifient de « toxicité » est en fait cette vertu qu’est l’intégrité.

Définissons nos termes et appliquons-les correctement

Si on doit débattre de la « toxicité », mettons-nous au clair sur le sens que nous donnons chacun à ce terme, de sorte qu’on ne se retrouve pas les uns à défendre une chose et les autres à en critiquer une autre. D’après le dictionnaire, la toxicité est définie comme le « Caractère de ce qui est nocif ». La définition appropriée de nocif dans notre contexte serait « extrêmement désagréable ou malveillant ».

Je suis même disposé, pour le moment et dans le cadre de cette discussion, à accepter une étiquette modifiée pour notre prétendue « toxicité ». Mais il est important d’associer un adjectif à ce terme chargé. Je vais donc, pour y faire référence, employer le terme « toxicité fondée sur des principes ». Pourquoi ? Eh bien, parce que nous n’étions pas toxiques vis-à-vis d’Elon jusqu’à ce qu’il prenne des mesures qui violaient nos principes. Je m’explique.

La « toxicité fondée sur des principes » est une intolérance à l’égard de ce que les bitcoiners considèrent comme des compromis fatals pour Bitcoin. Parmi les exemples de ce que nous considérons comme des compromis fatals on va trouver des idées comme :

  • Abandonnons un peu de décentralisation pour que le prix augmente ; ou
  • Renonçons à une ingénierie saine pour augmenter notre base d’utilisateurs ; ou
  • Renonçons à une sécurité du Bitcoin basée sur l’utilisation de l’énergie afin de gagner en popularité auprès de ceux qui se méprennent à son sujet, estimant (à tort) que l’utilisation de l’énergie nuit à l’environnement.

En fait, toutes ces sujets, et bien d’autres encore, renvoient à une considération générale plus vaste : Nous ne sommes pas disposés, quelles qu’en soient les circonstances, à compromettre l’intégrité de Bitcoin.

Brève analogie avec les ponts

Éloignons-nous un instant du Bitcoin et imaginons plutôt un pont. Tu n’es pas forcément un super connaisseur en matière de ponts, mais tu sais qu’ils peuvent s’effondrer lorsqu’ils sont mal construits ou mal entretenus, et c’est ce qu’il nous faut retenir pour cette comparaison.

Imagine que tu es responsable d’un pont sur lequel les gens, dont tu fais partie, comptent pour se rendre d’un point à un autre. Imagine que ce pont doit fonctionner sans subventions publiques, en facturant à ses utilisateurs un prix qu’ils acceptent volontairement de payer.

Quelles seraient les conséquences d’un manquement à l’obligation de préserver au maximum l’intégrité du pont ? Serais- tu disposé à vendre des éléments essentiels du pont et à les remplacer par des éléments de qualité inférieure afin de réaliser un profit à court terme ? Serais-tu prêt à fabriquer des parties du pont à partir de composants fragiles parce que ces composants sont « populaires » auprès de personnes qui n’y connaissent rien en matière de ponts ? Adopterais-tu des pratiques d’ingénierie non éprouvées (voire falsifiées) parce que des « influenceurs » les ont défendues et ont menacé de boycotter ton pont si tu n’appliques pas ces mauvaises pratiques ?

Si tu as répondu « oui » à l’une de ces questions, tes décisions finiront par provoquer l’effondrement du pont, occasionnant avec lui la mort ou les blessures de malheureux usagers le traversant à cet instant. Si tu as répondu « non » à toutes ces questions : félicitations – toi et ton pont vous conserverez votre intégrité.

Maintenant, supposons que ces décisions visant à préserver la sécurité et la solidité de ton pont ont conduits les gens à te traiter de « toxique ». Supposons que ces décisions ont fait fuir tous ceux qui clamaient qu’il fallait construire le pont avec des matériaux fragiles parce que leur production utiliserait moins d’énergie que pour celle de matériaux durables et robustes. Supposons que de nombreux concurrents aient créé de nombreux ponts fragiles et t’aient désigné comme inutilement « intolérant ».

Pendant tout ce temps, ton pont supportait des charges utiles et un trafic importants et toi tu t’appliquais à étendre son champs d’action en toute sécurité, tandis que tous ces autres ponts guère sollicités faisaient l’objet d’intenses spéculations alors que leurs promoteurs en vendaient des actions.

Si tu es quelque peu intègre, à un moment donné, ne serais-tu pas tenter de dire « allez voir ailleurs » à ceux qui te poussent à faire de ton pont un danger public ?

Mais que se passerait-il si ces personnes s’exclamaient alors : « Aha ! Je savais bien que vous étiez toxique ! Vous venez de me faire fuir ! Je vais mettre mon argent dans DogeBridge », ce pont qui n’est qu’un véritable canular dont les concepteurs ont simplement photocopié les plans d’un pont bancal, y effaçant au hasard certains éléments pour y inscrire des blagues à la place. Que se passerait-il ?

Et s’il s’avérait en outre qu’après s’être rapproché de toi en prétendant soutenir ton pont, le principal investisseur de DogeBridge, par ailleurs l’homme le plus riche du monde aux dizaines de millions de followers, avait menti sur Twitter quant à l’intégrité de ton pont, menacé d’en vendre toutes ses actions et suggéré qu’il pourrait tout miser sur DogeBridge…. ? Pourrais-tu, à la lumière de tout cela, lui dire d’aller se faire foutre ?

Ce scénario est précisément ce qui s’est déroulé avec Bitcoin, le système intègre, ses concurrents bon marché et défectueux, parmi lesquels le Dogecoin chéri d’Elon Musk, et Elon Musk en personne.

Des ponts au Bitcoin

Tout comme un pont, Bitcoin est un produit d’ingénierie. Il est conçu pour être une monnaie sûre et solide.

Le scénario du pont décrit ci-dessus correspond exactement à celui auquel Bitcoin et sa communauté sont confrontés chaque jour. Et ce choix des bitcoiners de préserver l’intégrité de Bitcoin, notre pont « monétaire », est précisément le choix que nous avons fait depuis que chacun d’entre nous est impliqué dans ce projet.

Nous faisons preuve d’intégrité et nous n’avons rien à nous reprocher, ni aucune excuse à présenter. Pour nous, Bitcoin n’est pas une blague. Ce n’est pas un moyen de s’enrichir rapidement. Pour beaucoup d’entre nous, c’est la chose la plus importante à l’œuvre dans le monde. C’est un combat pour la liberté, la justice et le retour à l’intégrité dans un monde qui en manque si cruellement qu’il identifie l’intégrité à une forme de poison.

« L'intégrité est la loyauté envers ses convictions et ses valeurs »

Constatons ce à quoi mène le sacrifice de l'intégrité

Examinons ce qu’un manque d’intégrité, ou un défaut de « toxicité fondée sur des principes » a pu entraîner dans d’autres disciplines tels que la politique, l’éducation, l’environnement-climat, la santé, etc..

Toutes ces disciplines ont malheureusement, par manque d’intégrité, atteint un niveau de pourrissement avancé. Nous avons des hommes politiques prêts à mentir pour gagner une popularité basée sur le mensonge ; une éducation qui endoctrine nos enfants avec des contre-vérités politiquement chargées et qui ne leur enseigne pas à penser par eux-mêmes ; des préoccupations climatiques exagérées, terrifiant adultes comme enfants au lieu de proposer des solutions rationnelles et scientifiques ; et une exagération d’une ampleur historique, sans précédent, dans la surréaction à la pandémie mondiale du covid-19. Chacun de ces compromis non fondés a conduit à l’effondrement final (et parfois rapide) de l’intégrité du système.

Si ces autres disciplines avaient pu repousser avec toxicité ces charlatans qui les ont infiltrées au lieu de se compromettre avec eux, elles représenteraient aujourd’hui bien autre chose que ces démonstrations du degré de stupidité et de décrochement de la réalité auxquels peuvent aboutir tous les domaines pervertis par de fausses théories.

Ces systèmes ne souffrent-ils pas, en réalité, de quelque chose qui mériterait en fin de compte beaucoup mieux l’étiquette « toxique » d’ « extrêmement désagréable et malveillant » ?

Retour aux bitcoiners

Les bitcoiners « toxiques sur la base de principes » ont-ils le monopole de la vérité ? Non. Absolument pas.

Nous avons une théorie en cours de d’élaboration en laquelle nous avons pleine confiance car nous avons vu de nombreuses preuves qui la soutiennent et rien qui ne la contredise. Nous disposons en fait de plusieurs théories – des théories sur ce qu’il faut pour défendre Bitcoin, des théories sur ce que Bitcoin signifie du point de vue des droits de l’homme et des libertés, des théories sur les principes sur lesquels nous ne ferons aucune concession et nous ne bougerons pas d’un pouce.

En fait, Bitcoin est si difficile à changer qu’il nous permet de préserver les principes au cœur de ces théories. Vous avez plutôt intérêt à croire que nous adopterons une position de principe et sans compromis sur Bitcoin – la colline sur laquelle nous périrons – pour préserver nos principes.

Telle est notre réaction face à la menace d’Elon Musk indiquant vouloir se délester de tous ses bitcoins pour se lancer à fond dans le stupide projet crypto Dogecoin :

Jack Mallers :

« Désolé, il fallait que quelqu’un le dise. J’en ai rien à foutre que tu sois riche ou célèbre. Je n’ai pas peu de toi, tu es un trou du cul égoïste.

Laisse Bitcoin en dehors de ton sentiment d’insécurité.

L’humanité ne gagne rien avec ton ego.
L’humanité gagne tout avec Bitcoin. Je périrai sur cette colline. »


La Saumure, Pedro, Yellow, Senor Sam, …. [ une armée de bitcoiners prêts à se sacrifier pour la cause, pour la défense de certains principes sacré instanciés par le protocole Bitcoin] : 

« Je périrai sur cette colline. »

Attention : contenu « toxique » à suivre

Vous voulez des concessions faisant fi des principes ? Vous en trouverez beaucoup en dehors de Bitcoin :

  • Unissez-vous à ceux qui veulent cesser de produire de l’énergie à partir du feu et qui s’opposent à diviser l’atome,
  • Mangez et buvez cette boue transformée marketée par les plus grandes entreprises « alimentaires » de la planète,
  • Votez pour « choisir » entre Biden et Trump.
  • Regardez impuissants les élites faisant l’étalage de toute leur vertu et proclamant « la fin des privilège » en imprimant ex-nihilo des dizaines de milliers de milliards de dollars pour s’en accaparer l’essentiel.

C’est ce que l’on nous sert dans ces systèmes compromis et prétendument « non toxiques ». Posez-vous donc la question suivante : « Lequel de ces systèmes est réellement toxique ? Lequel d’entre eux est empoisonné à tel point qu’il ne peut plus remplir la fonction qu’il prétend assurer? »

Des bitcoiners intransigeants qui défendent l'intégrité

En toute chose, Bitcoin continue à faire ce qu’il avait annoncé dans le livre blanc publié en 2008 parce que les bitcoiners refusent de céder le moindre pouce de territoire.

Le gouvernement américain respecte-t-il toujours les droits enracinés dans le Bill of Rights ou mène-t-il une bataille quotidienne contre les individus soucieux de préserver leur liberté ? Le système de santé donne-t-il la priorité aux soins et à la santé des patients ou s’emploie-t-il avant tout à faire pression pour gagner l’approbation du gouvernement (FDA – Food and Drug Administration) et à écarter la concurrence à force de lobbying? Je ne vais pas multiplier les exemples, car mon propos ici n’est pas d’attaquer d’autres industries, mais simplement de défendre les bitcoiners.

Alors, à tous ceux qui veulent que nous fassions des concessions, nous répondons : « Tant pis. Allez voir ailleurs. Il y a beaucoup de communautés prêtes à faire des compromis. Mais pas celle-ci. »

Si tu estimes que notre approche repousse toutes ces personnes sans principes en recherche de compromis que tu aimerais que notre communauté accueille, ce n’est pas ton jour de chance. Vas donc gérer une autre « crypto-monnaie » (et bien sûr, par « gérer », je ne veux pas dire la faire fonctionner de manière décentralisée, parce que chacune d’entre elles, à l’exception du Bitcoin, a été compromise au point qu’il est désormais impossible de le faire).

Si, en revanche, tu prends conscience que l’intégrité est un compromis entre principes et popularité, alors considères Bitcoin avec attention. Si tu réalises que l’intégrité consiste à ne pas se compromettre pour des intérêts qui nuiront à tes objectif, tu comprendras pourquoi les bitcoiners ne tolèrent pas le genre de comportement qu’Elon Musk a manifesté. Et peut-être en viendras-tu même à apprécier ce que nous créons pour nous-mêmes et que nous n’imposons à personne. Si tu en conclues que tu apprécies ce que nous faisons, tu constateras que notre communauté est extrêmement accueillante, solidaire, amicale et même aimante.

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