L’Étalon-Fiat – La récolte de la nourriture fiat

Saifedean Ammous, Économiste,
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Auteur de l’Étalon Fiat et de l’Étalon Bitcoin
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Ce texte est extrait de L’Étalon-Fiat, ouvrage désormais très populaire parmi les bitcoiners (disponible notamment  ici) et suite logique du best-seller mondial L’Étalon-Bitcoin.

Ouvrage original : Saifedean Ammous, The Fiat Standard: The debt slavery alternative to human civilization
Traduction : Gary Sablon, Catherine Charbonneau, Henry J.K.I. Young, Edouard Gallego, Morgan Taglang, Laurent Waisman, David St-Onge, Konsensus Network.

NB: À l’exception des données statistiques, les illustrations et autres médias présentés sur cette page ne figurent pas dans le texte original.

La récolte de la nourriture fiat

Les huiles végétales et les produits à base de soja ont des utilisations industrielles légitimes. Le maïs, le soja et le lait écrémé constituent une nourriture adéquate pour le bétail, bien que certainement moins efficace que de le laisser paître. La farine et le sucre transformés peuvent être utilisés comme des drogues récréatives en quantités infimes, mais aucun de ces produits n’a sa place dans l’alimentation humaine et doivent être évités afin de rester en bonne santé. Pourtant, la technologie et la science continuent de progresser et de rendre ces produits moins chers, les gouvernements subventionnent davantage leur production, et les gens en consomment de plus en plus, atteignant un niveau de consommation tout bonnement incroyable. Des machines toujours plus rapides et puissantes sont utilisées afin de réduire le coût de production de ces matières de manière très significative, et à mesure que la technologie industrielle progresse, la production de ces aliments est devenue de moins en moins coûteuse.

Dans certaines filières, les procédés industriels permettent des gains de productivité gigantesques. C’est le cas de la fabrication du pain (1961, source). La production de viande de qualité ne « bénéficie » pas de telles évolutions.

En revanche, l’industrialisation ne peut pas faire grand-chose pour diminuer le coût de production de viande rouge, hautement nutritive mais rapidement périssable, produite en permettant au bétail de se déplacer librement sur de vastes étendues de terre, de brouter et de prendre le soleil. En revanche, les aliments artificiels de l’agriculture de monoculture ont une durée de conservation stable, ce qui leur permet de rester stockés ou exposés pendant de longues périodes et de se répandre largement. Pire encore, certains de ces produits sont hautement transformés, conçus pour être artificiellement appétissants et créer une dépendance. L’omniprésence de ces aliments bon marché, fortement subventionnés, hautement savoureux mais toxiques, représente un véritable désastre pour la santé de l’espèce humaine.

Préférence temporelle et choix alimentaires : Dans l’Étalon Bitcoin, Ammous illustre le concept de préférence temporelle par le test du marshmallow conduit par Walter Mischel à l’université de Stanford en 1972. Dans cette expérience, les enfants qui sans attendre mangent le premier marshmallow exprime une préférence temporelle élevée : la consommation immédiate prime sur la consommation future. Ceux qui renoncent à une satisfaction immédiate pour doubler leur récompense manifestent une préférence temporelle plus faible : à leur yeux la consommation immédiate n’a guère plus de valeur que la consommation différée, ainsi lorsque la consommation future réserve un gain plus élevé que la consommation actuelle, ils patientent.

Une autre façon de percevoir l’impact de l’augmentation de la préférence temporelle consiste à observer les choix alimentaires des individus. De la même manière que la dépréciation de l’argent incite les gens à privilégier le présent, ils sont également plus susceptibles de se laisser tenter par des aliments procurant du plaisir sur le moment, au détriment de leur santé future. Le passage à une prise de décision à court terme favorise invariablement une plus grande consommation d’aliments nocifs, mentionnés ci-dessus. 

Manger des biscuits et des barres chocolatées, par exemple, peut procurer un sentiment agréable à court terme, mais à plus long terme, cela aura certainement un impact sur la santé du consommateur. Il est très peu probable que la médecine moderne mentionne les facteurs alimentaires évidents des maladies modernes, la prévention n’est pas bonne pour les affaires. Pourquoi empêcher quelqu’un de devenir diabétique, alors que vous pourrez lui vendre de l’insuline pour le restant de sa vie raccourcie ? La foi religieuse qui prévaut dans le pouvoir de la médecine moderne de corriger tous les problèmes de santé, encourage encore plus les individus à croire que manger des aliments industriels n’a aucune conséquence.

Nous sommes en 1936 et ce film enseigne à toutes les maitresses de maison américaines les techniques culinaires adéquates pour préserver la teneur en vitamines des aliments. Un accent sur la prévention et une qualité d’information largement érodés depuis. Le message souligne l’importance de la qualité de l’alimentation pour la santé de la nation.

Les subventions gouvernementales en faveur de la production d’aliments nocifs pour la santé – et les scientifiques affiliés qui recommandent et exigent que nous les consommions – ont été extrêmement efficaces pour altérer les choix alimentaires des Américains. Entre 1970 et 2014, la consommation de viande rouge par habitant a diminué de 28 %, celle de lait entier de 79 %, d’œufs de 13 %, de graisses animales de 27 % et de beurre de 9 %. En revanche, la consommation d’huiles « végétales » toxiques a augmenté de 87 % et celle de céréales de 28 %. Dans un souci de respect exemplaire des directives gouvernementales, les Américains ont également augmenté de manière significative leur consommation de fruits et de légumes frais. Cela constitue un indicateur important sur le moteur de l’obésité : ce n’est pas l’absence de consommation de fruits et légumes, mais le déclin de la consommation de viande, en particulier de viande rouge. La consommation globale de viande est restée relativement constante, augmentant de 2 %. Cela s’explique par le fait que les consommateurs américains ont remplacé la viande rouge, essentielle et hautement nutritive, par de la volaille de qualité inférieure, bon marché et produite en masse. Globalement, les calories des Américains provenant d’aliments d’origine animale ont diminué de 21 %, tandis que les calories provenant d’aliments d’origine végétale ont augmenté de 14 %.

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Nina Teicholz estime que l’Américain moyen mangeait environ 80 kg de viande au XIXe siècle, principalement de la viande rouge. Aujourd’hui, l’Américain moyen mange environ 45 kg de viande par an, dont la moitié provient de volailles. Un siècle de progrès technologique et une croissance économique toujours plus forte ne se sont pas traduits par une augmentation de la consommation des aliments les plus recherchés et les plus nutritifs. Au contraire, les Américains doivent dorénavant se contenter de sources d’alimentation de qualité inférieure et plus économiques. 

Les conséquences de cette transition alimentaire sur la santé des Américains ont été calamiteuses. L’obésité est en augmentation constante depuis les années 1970, de même que de nombreuses maladies chroniques. La science moderne de la nutrition et ses sponsors industriels ont tout fait pour nous convaincre que cela n’avait rien à voir avec le régime alimentaire.

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La plupart de ces produits chimiques n’existaient pas il y a 100 ans, et ceux qui existaient étaient principalement utilisés à des fins industrielles, en tant que lubrifiants par exemple. Au fur et à mesure que l’industrialisation s’étendait et que le gouvernement entretenait l’hystérie contre les graisses animales, ces produits toxiques ont été promus dans le monde entier par les gouvernements, les médecins, les nutritionnistes et leurs sponsors comme l’alternative saine. La propagation de ces substances dégoûtantes à travers le monde, remplaçant toutes les graisses traditionnelles utilisées depuis des millénaires, est un témoignage stupéfiant du pouvoir de la propagande gouvernementale qui se cache sous le vernis de la science. La regrettée Dr Mary Enig, de la Weston Price Foundation, a beaucoup écrit sur les différents types de graisses et leur impact sur la santé.

On ne peut trouver de représentation plus pertinente de l’impact de l’inflation et de la monnaie fiat. La richesse des Américains augmente sur le papier, et les statistiques affirment que leur qualité de vie s’améliore. En réalité, la qualité de leur alimentation se dégrade car la quantité de nutriments qu’ils consomment diminue, et leur santé mentale et physique se détériore. 

Au lieu de nutriments, les Américains se nourrissent de plus en plus de médicaments et de produits industriels toxiques. La variété et les quantités croissantes de substances industrielles aromatisées qui remplissent les réfrigérateurs des Américains ne sont pas nutritives, et ne constituent pas une alimentation raisonnable. L’obésité croissante des Américains n’est pas un signe de richesse et d’abondance mais un symptôme de privation. Le niveau des dépenses et des revenus en Amérique peut augmenter selon les statistiques gouvernementales, mais si les Américains travaillent plus longtemps qu’ils ne l’ont jamais fait et que leur alimentation se détériore, il doit y avoir quelque chose de sérieusement défectueux dans la monnaie qu’ils utilisent, dans sa fonction de réserve et de mesure de la valeur. 

Le pacte avec le diable – la monnaie fiat – n’a pas fourni le repas gratuit promis par ses promoteurs. Au lieu de cela, elle a apporté des mélanges de résidus industriels à base de soja et de sirop de maïs à haute teneur en fructose, pauvres en nutriments, et extrêmement néfastes pour la santé et le bien-être des consommateurs. L’augmentation constante du coût des médicaments et des soins médicaux ne peut être comprise sans tenir compte de la détérioration de la santé, de l’alimentation et du sol, ou du système économique et nutritionnel qui a engendré cette situation catastrophique.

Le monde moderne souffre d’une crise d’obésité sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Jamais auparavant autant de personnes n’ont été en surpoids. Face à cette crise se trouve une incompréhension majeure, qui consiste à la présenter de manière flatteuse comme une crise d’abondance : c’est grâce à notre richesse que notre plus grand problème est l’obésité plutôt que la famine. 

Le paradigme totalement erroné de la nutrition – un autre domaine de recherche académique complètement déformé par le financement et l’intervention du gouvernement – met l’accent sur l’importance d’obtenir une quantité nécessaire de calories. Elle insiste sur le fait que la meilleure façon d’obtenir les calories nécessaires est d’avoir un régime alimentaire diversifié et « équilibré » comprenant de grandes portions de céréales. La viande et les graisses animales sont considérées comme nocives et doivent être consommées avec modération, voire pas du tout.

Le nouveau score de la boussole alimentaire de Tufts, qui guide les directives diététiques nord-américaines, recommande les Lucky Charms, les Cheerios au miel, les M&Ms et les faux œufs plutôt que le bœuf haché et un œuf entier dans du beurre. Il s’agit d’une guerre contre les aliments d’origine animale. [Source]

De ce point de vue, l’obésité survient lorsque l’on consomme trop de calories, et la malnutrition lorsque l’on en consomme trop peu. Cette vision est aussi simpliste et ridicule que la théorie économique keynésienne, stipulant que l’état de l’économie est principalement déterminé par le niveau des dépenses globales, trop de dépenses provoquant de l’inflation et trop peu de dépenses provoquant du chômage.

En réalité, la nutrition ne se limite pas à un simple apport calorique. Il s’agit d’obtenir des quantités suffisantes de nutriments essentiels pour le corps, qui se répartissent en quatre catégories : protéines, graisses, vitamines et minéraux. Les graisses sont principalement utilisées pour fournir de l’énergie au corps, les protéines pour construire et reconstruire le corps et ses tissus, et les vitamines et minéraux sont nécessaires aux processus vitaux qui se déroulent dans le corps. L’autre grand groupe alimentaire, les glucides, n’est pas essentiel au corps humain mais peut être utilisé pour fournir de l’énergie. En l’absence de nutriments essentiels, le corps commence à se détériorer, avec des conséquences négatives qui se manifestent par des maladies. 

En particulier, l’absence de protéines animales et d’acides gras amène le corps à entrer en mode famine : la dépense énergétique est réduite, ce qui se manifeste par une léthargie physique et mentale, et l’organisme commence à convertir son apport en glucides en dépôts d’acides gras pour les stocker en vue d’une utilisation future (en d’autres termes, en graisse). Plutôt qu’un signe de richesse et de suralimentation, l’obésité est en fait un signe de malnutrition. La capacité à digérer les sucres et à les convertir en réserves d’acides gras est une stratégie évolutive extrêmement utile pour gérer la faim à court terme, mais lorsque la privation de nutriments essentiels devient un mode de vie, le stockage des graisses se transforme en une maladie incapacitante qu’est l’obésité. Les Américains ne sont pas gros parce qu’ils sont prospères et ont de la nourriture en abondance ; ils sont en surpoids parce qu’ils se nourrissent mal et sont appauvris sur le plan nutritionnel.

Nous souhaitons tous vivre dans une société « plus inclusive ». Mais n’est-il pas plutôt question ici d’un flagrant déni de réalité ?

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